Dossier Santé (2ieme partie): Singapour

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Ceci est la deuxième partie de mon Dossier Santé dans lequel j’explore divers systèmes de santé à travers le monde dans le but de démontrer comment notre système pourrait être amélioré en puisant des idées qui ont déjà fait leur preuve ailleurs. Cette semaine, je ferai une survol du système de Singapour.

Pourquoi Singapour?

J’avais déjà écrit sur le système de Singapour il y a quelques mois, mais j’ai choisi de le revisiter dans le cadre de ce dossier parce qu’il est véritablement unique en son genre. Singapour est une ancienne colonie britannique qui est devenue un des plus importants centres de commerce de l’Asie du sud-est. Au chapitre de la santé, malgré sa grande prospérité, Singapour arrive à faire beaucoup avec très peu. Alors que partout ailleurs, les coûts des soins de santé semblent exploser, les coûts de santé de Singapour par rapport à son PIB ont diminué de 3.6% à 3.3%. Malgré ce qui semble un minuscule investissement, la qualité des soins y est excellente et les singapouriens ont une espérance de vie et un état de santé comparable aux pays d’Europe et d’Amérique du Nord. Les faibles coûts du système singapourien s’explique en partie grâce à la faible superficie et la population relativement réduite qui fait qu’il n’ont pas à maintenir des hôpitaux dans des régions éloignées et peu populeuses. Il n’est donc pas dit qu’on obtiendrait les mêmes résultats en transplantant ce système au Québec, mais je serais vraiment curieux de tenter l’expérience.


Singapour en chiffres.

Canada

Singapour

Population (2007) en millions

32 876

4436

Âge médian

39

39

PIB par habitant ($ PPA int.)

35 310

48520

Dépenses de santé % du PIB (2006)

10,0

3.3

Dépenses de santé par habitant ($ PPA int.)

3 673

1536

Espérance de vie à la naissance (2007)

81

81

Nbre de Médecins par 10 000 habitants

19

15

Nbre d’infirmières et sages-femmes par 10 000 habitants

101

44

Nbre de lits d’hôpitaux par 10 000 habitants

34

32

(Source: OMS)

En regardant les données ci-haut, on peut remarquer que Singapour n’a pas l’envergure du Canada, ni même du Québec, ce qui fait que les singapouriens peuvent vivre aisément avec un personnel médical relativement réduit. Compte tenu des superficies respectives des deux territoires, les chiffres des effectifs médicaux sont plutôt trompeurs puisqu’ils sont concentrés sur seulement 647,8 km2. Ceux-ci sont tout simplement utilisées plus efficacement. Mais comme dans bien des cas, les statistiques ne racontent pas toute l’histoire. Il faudra creuser plus creux pour déterminer pourquoi l’OMS a attribué le 6e rang de son classement à Singapour.

Financement

Comme je le mentionnais plus tôt, les système singapourien est unique et offre une approche très originale autant pour le financement que l’organisation des services. L’accès aux soins est universel et garantit par une combinaison de plan d’épargne obligatoire à tous les travailleurs et des subventions de l’état qui réduisent les coûts des soins considérablement aux moins nantis. De ce fait, bien que les mieux nantis peuvent bénéficier de chambres privées ou semi-privées, la qualité des soins elle-même est la même. Les riches paient simplement plus pour obtenir ces soins.  Le système de financement des soins singapourien fonctionne selon un système appelé les trois « M ».

Medisave

Medisave est un compte d’épargne-santé obligatoire géré par l’état qui couvre environ 85% de la population. Il est une composante du programme de pension obligatoire appelé Central Provident Fund ou CPF. Typiquement les employés y versent 20% de leur salaire et les employeurs fournissent 13%. Environ 6 à 8% de cet argent est déposé dans le compte Medisave de chaque travailleur. Le compte Medisave peut alors servir à rembourser les frais médicaux et hospitaliers courants encourus par les travailleurs et leur famille immédiate. L’idée est de couvrir compètement les couts de la plupart des patients dans les hôpitaux publics subventionnés par l’état. Au-delà de tout ça, les patients doivent payer de leur poche ou à partir d’une assurance supplementaire comme le MediShield.

Medishield

MediShield est un plan d’assurance national à déductible élevé et faible prix qui couvre les frais plus élevés des maladies et accidents sérieux ou catastrophiques. Les singapouriens ont aussi le choix de plusieurs assurances privées similaires. Toute les primes d’assurance peuvent être payées à partir du compte MediSave.

MediFund

MediFund, le troisième volet est un fond d’assistance aux démunis qui couvre ceux qui ne sont pas couverts sous MediSave et qui n’ont pas les moyens de payer leurs frais médicaux. L’accès à MediFund est sujette à une étude de moyens ponctuelle pour s’assurer que l’aide va seulement à ceux qui en ont vraiment besoin et couvrent les soins de base dans les hôpitaux publics. C’est le filet de sûreté qu’offre l’état pour s’assurer que personne ne soit laissé sans accès aux soins de santé.

Eldershield

Eldershield est un ajout à la structure 3M originale qui fournit une protection additionnelle qui consiste en une assurance privée qui couvre les divers handicaps causés par la vieillesse. Il fournit une allocation mensuelle à ceux qui se retrouvent incapables d’accomplir trois activités de base de la vie de tous les jours ou plus.

La prestation des soins.

À Singapour, 80% des soins primaires sont fournis par des cliniques et praticiens privés et 20% sont fournis par des polycliniques publiques. À l’opposé, les soins nécessitant une hospitalisation sont livrés à 80% par des hôpitaux publics et 20% par le privé. Les différents prix sont contrôlés par le gouvernement, mais les praticiens, cliniques et hôpitaux publics et privés on la liberté de fixer leurs prix à l’intérieur de certaines limites. La liste de prix de chaque pourvoyeur de soins doit être disponible aux patients afin de leur donner la possibilité de magasiner. Comme les patients ont le contrôle de leurs propres dépenses de santé, ils ont la possibilité de mieux choisir avec l’aide de leur pourvoyeur quels traitements sont appropriés.  Le pouvoir décisionnel est dans les mains des patients et des médecins plutôt que celles d’un assureur ou d’un fonctionnaire.  Le fait que les patients doivent co-payer, freine les abus et la compétition entre les cliniques, hôpitaux et praticiens réduit les coût et améliore les services. Étant donné qu’ils sont plus conscients des couts, les singapouriens sont aussi plus conscients des impacts de leur mode de vie sur leur santé et font des choix plus éclairés sur leur style de vie. Par exemple, il n’y a presque pas d’obésité à Singapour.

Conclusion.

Le système singapourien vaut la peine d’être étudié. Il offre une approche très originale à la problématique des coûts en santé. En mettant le contrôle entre les mains des patients et des praticiens et en gardant au minimum les interventions de l’état, Singapour arrive à limiter ces coûts de façon à ce que leur croissance soit soutenable par rapport aux revenus du pays, Contrairement au Canada ou même aux États-Unis où les décisions sont trop souvent laissées à des bureaucrates, le patient dépense lui-même l’argent qu’il a accumulé dans son compte medi-save comme bon lui semble et il est donc responsable de sa propre santé. Ses choix par rapport à ses soins de santé ou son mode de vie, n’ont pas un aussi gros impact sur les autres. Il est donc libre d’accepter les conséquences des mauvais et des bons choix dans son mode de vie. Le résultat est un système d’hôpitaux modernes et bien équipés qui offrent des soins de qualité à tous les singapouriens, mais à plus faible coût que presque partout ailleurs.

Sources:

Singapore Ministry of Health: Healthcare System

Singapore’s Health Care System: A Free Lunch You Can Sink Your Teeth Into

The Singapore Model

OMS: Statistiques Sanitaires Mondiales 2010

A propos de l'auteur

Mon nom est Philippe. J'habite sur la rive sud de Montréal. Je suis un technicien en informatique qui aime discuter de toute sorte de sujets. Bienvenue sur mon blogue!

5 Réponses à “Dossier Santé (2ieme partie): Singapour”

  1. Honnêtement, malgré que ça soit une société assez authoritaire  et paternaliste sur certains cadres et peu libertarienne en son sens (avec une certaine censure des médias, un service militaire obligatoire, et certains règlements particuliers très sévères) il faut dire que Singapour est probablement l'un des miracles de développement en ce monde avec entre autres un système de transport qui est maintenant dérèglementé depuis maintenant quelques années qui est carrément fantastique. Cependant, il est évident que la raison du succès du PAP auprès de la population s'explique d'une manière que la population est satisfaite de leur mode de vie qui demande de nombreuses particularités avec la forte densité de population et cela du fait depuis quelques décennies que l'état est peu présent mis à part dans le domaine du logement, de la sécurité publique, de la défense nationale et de la justice. Aussi, comme Hong Kong, Singapour est carrément une société, avec un certain fondement culturel, qui est basée sur la valorisation du travail et de l'éducation et sur le fait qu'un individu se doit de toujours se surpasser pour réussir tout en acceptant très mal la médiocrité en l'associant au déshonneur.

    Or, en 40 ans, cette cité-état a passé d'un coin tropical perdu à celle de leader économique mondial et d'une société véritablement parmi les plus développées sur cette planète tout en ayant une économie pratiquement libre qui donne une pression relativement basse auprès de ses contribuables et une société multiethnique et multiculturelle qui vit en grande harmonie comparé à ses voisins. Or, malgré qu'il y existe du chemin à faire, il faut dire que le modèle Singapourien bien qu'étant paternaliste apporte de plus en plus de libertés avec une population scolarisée et très ouverte sur le monde.

  2. La question que je me pose concerne le Medisave.  Qu’est-ce qui arrive de l’argent accumulé si la personne ou la famille n’a jamais ou très peu souvent l’occasion de s’en servir parce qu’ils sont en bonne santé?  Où même à la mort d’une personne?  Est-ce que l’argent accumulé demeure la propriété de l’état ou si par exemple elle pourrait continuer à couvrir les soins d’autres membres de la même famille?

    1. @Céline Lagacé

      Bonne question et une pour laquelle je suis resté sans réponse. Ce n'est pas mentionné nulle part dans tous les documents que j'ai consultés. La logique dicterait que cet argent soit versé aux héritiers légaux, ou à tout le moins au compte médisave des héritiers, mais rien n'est moins sûr.

  3. L'espérance de vie à Singapour était de 81 ans en 2008 pour les deux sexes, je l'ai vérifié sur le lien OMS, page 54. Vous notez 83 ans. Dois-je croire les autres chiffres que vous avancez? Je vous concède que je n'ai pas le courage de les vérifier tous.

    En tout cas vous m'avez convaincu qu'il est plus facile de gérer une municipalité, environ 700 km2 et 4,6 millions d'habitants, qu'un pays.

    Mais convaincu je l'étais déjà un peu.

    Par ailleurs, vous ne semblez pas mettre en doute la validité et la fiabilité des chiffres fournis par Singapour, grande et transparente démocratie comme chacun sait. Étonnant scrupule.

    Que vous n'avez pas, heureusement , pour contester les chiffres, sujets à caution également, de Cuba.

    J'aimerais assez connaitre le salaire moyen du généraliste (omnipraticien) et du spécialiste à Singapour.

  4. @ Guy Esseyric

    L’espérance de vie à Singapour était de 81 ans en 2008 pour les deux sexes, je l’ai vérifié sur le lien OMS, page 54. Vous notez 83 ans. Dois-je croire les autres chiffres que vous avancez? Je vous concède que je n’ai pas le courage de les vérifier tous.

    J'ai vérifié et vous avez raison. C'est corrigé

     

    Par ailleurs, vous ne semblez pas mettre en doute la validité et la fiabilité des chiffres fournis par Singapour, grande et transparente démocratie comme chacun sait. Étonnant scrupule.

    Que vous n’avez pas, heureusement , pour contester les chiffres, sujets à caution également, de Cuba.

    Et il n'existe aucune documentation des diverses sources que j'ai consulté qui mettent les statistiques de Singapour en sérieux doute, alors que c'est loin d'être le cas pour Cuba. Vous n'avez qu'à vérifier les liens que je mets en référence et faire vos propres recherches si vous voulez. Ça s'adonne que les médias à Singapour sont un petit peu plus libres qu'à Cuba et que par conséquent, c'est plus facile de faire des vérifications.

    J’aimerais assez connaitre le salaire moyen du généraliste (omnipraticien) et du spécialiste à Singapour.

    Selon ce sondage le salaire moyen d'un omnipraticien se situe autour de 126 000 $Singapourien ce qui revient à environ 90 000 $US, c'est un peu inférieur à l'échelle canadienne. Je n'ai pas pu trouver de données pour les spécialistes.