Fannie et Freddie: le cauchemar sur Wall Street.

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Beaucoup d’encre a déjà coulé au sujet de la crise immobilière aux États-Unis et du sauvetage in extrémis de Fannie Mae et Freddie Mac par le trésor américain. Que le contribuable américain ait dû renflouer ces deux compagnies pour éviter un effondrement bancaire va probablement être acclamée par les historiens, mais c’est une des pires bourdes étatiques de l’histoire. Naturellement les médias blâment le libéralisme économique et le capitalisme sauvage pour la crise actuelle. C’est vrai que le marché a le dos large, mais peu de gens comprennent comment tordu par l’interventionnisme de l’État ce marché est en réalité. Contrairement à la sagesse populaire, c’est cet interventionnisme qui est coupable d’avoir causé cette crise et non «la folie des marchés». Commençons par un peu d’information de base.

Que sont les «subprime»?

Les subprimes sont des prêt hypotécaires consentis à des emprunteurs qui ont des dossiers de crédit moins que reluisants.  Historiquement, ces hypothèques sont consenties de façon relativement marginale, mais pendant la période de 2004 à 2006, ils ont gonflé au point qu’il représentent maintenant un prêt hypothécaire sur cinq. Il semblerait que les banquiers devraient être fous pour accorder tant d’hypothèques risquées, mais il y a plusieures interventions de l’État qui sont venues changer la donne.

Fannie et Freddie

La Federal National Mortgage Association (FNMA) ou Fannie Mae était originalement une agence gouvernementale créée ent 1938 par l’administration Roosevelt qui avait pour mission de founir des liquidités pour faciliter l’accessibilité à la propriété aux familles défavorisées.  L’agence pouvait émettre des obligations et se servir des fonds pour racheter des hypothèques consenties à des familles défavorisées. Le gouvernement garantissait les obligations même si les hypothèques étaient prises en défaut. Cette forme de subvention fût très populaire, incitant beaucoup de banques à émettre des prêts refinancés par Fannie Mae, qui ensuite les vendait à des investisseurs sous forme d’obligations appelées «morgage backed securities» (MBS). En 1968, l’administration Johnson, embourbée dans la guerre du Viet Nam, se rendît compte que les engagements publics que ces garanties représentaient alourdissaient beaucoup le bilan de l’État Fédéral et limitait sa capacité d’emprunt.  Il fût dont décidé de privatiser, du moins en apparence, Fannie Mae en lui donnant le statut de «Government Sponsored Enterprise» (GSE).

En 1970, afin de créer une apparence de compétition dans le marché des MBS, le gouvernment Nixon créa un autre GSE, la Federal Home Loan Mortgage Corporation (FHLMC), mieux connue sous le sobriquet de «Freddie Mac». Bien que le gouvernement clâmait en public qu’il ne garantissait plus les MBS de Fannie Mae et Freddie Mac, en réalité il était entendu par les investisseurs que le gouvernement ne les laisserait jamais faire défaut. L’aide de l’État dans la faillite des caisses d’épargne (savings ans loan) vers la fin des années 1980 n’ont fait que renforcer cette impression d’un filet de sécurité garanti par l’État. C’est ce filet de sécurité étatique qui incita les différents acteurs du marché hypothécaire à l’imprudence.

Comment créer une bulle immobilière…

Avec Fannie et Freddie derrière pour racheter les prêts, les banques se mirent à offrir de plus en plus de prêts subprime, qui de cette façon ne comportaient que peu de risques pour la banque elle-même. De plus certains banquiers peu scrupuleux se mirent à émettre des prêts plutôt douteux, sachant qu’ils seraient garantis par l’État en cas de faillite. Certains diront que c’est la preuve qu’on ne peut pas faire confiance aux méchants capitalistes et ils n’ont pas tout à fait tort, mais ils n’auraient jamais fait ça si ce n’avait été du filet de sécurité de lÉtat.

Mais il y a pire encore. En 1993, le US Department of Housing and Urban Development, HUD pour les intimes, fût appointé comme organisme de tutelle de Fannie Mae et Freddie Mac. Cet organisme a pour objectif principal de promouvoir la propriété immobilière, et notamment pour les ménages les moins aisés. Pour atteindre ces objectifs, les dirigeants du HUD ont pu faire adopter des mandats qui obligèrent les GSE à compter successivement dans leur portefeuille 42% (1995), 50% (2000) et 56% (2004) de prêts subprime.

De plus, dans les années 1990, des études ont démontré que le taux de refus sur les prêts hypotécaires était plus élevés chez les noirs et les hispaniques. Certains lobbies y voyant non le résultat du fait que ces groupes sont plus défavorisés économiquement, mais plutôt un forme de racisme de la part des milieux financier, on fait pression sur le gouvernement. Le résultat: une loi anti-discriminatoire, le Community Reinvestment Act ou CRA fût renforcée pour rendre plus difficile le refus des banques en vers les communautés ethniques, sous peine de sanctions. On força donc les banques à prendre des prêt plus risqués au nom de la discrimination positive et de la rectitude politique. Prêts qui furent naturellement revendus à Fannie et Freddie.

Comme si ce n’était pas assez, après les attentats du 11 septembre 2001, la réserve fédérale (la FED) ou la banque centrale des É-U, instaure une politique de soutien inflationniste en baissant son taux d’intérêt à 1% pour soutenir le dollar, rendant le crédit encore plus abordable et faisant grimper les prix immobiliers en flèche.  Ce qui devait arriver, finit par arriver. La FED ne pouvait pas garder ses taux d’intérêts bas indéfiniment et a dû éventuellement les monter. Bien des emprunteurs qui avaient profité de la bulle immobilière pour acheter des propriétés au-dessus de leurs moyen se sont retrouvés pris à la gorge.

La stupidité de l’État

Après la comédie des erreurs qui a mené à cette crise, le trésor américain n’avait plus d’autre choix que de renflouer ses deux créatures, mais ce faisant il ne fera que reporter le problème à plus tard si d’autres actions concrètes ne sont pas prises immédiatement. Il est essentiel que le gouvernement américain démantèle et réduise Fannie Mae et Freddie Mac en entités plus dirigeables et cesse de garantir les pertes. Les banques doivent être responsabilisées et accorder leurs prêts sur un base prudentielle et non selon les désirs égalisateurs de l’État.

Il n’y a que les politiciens étatistes qui peuvent croire qu’il est possible d’avoir un marché égalitariste et «forcer» les banques à accorder des prêts selon des critères autres que la solvabilité de l’emprunteur.  Sans le CRA et les GSE, l’accession à la propriété des minorités aurait certainement été plus lente, mais elle aurait été plus saine.

Source:

L\'institut Hayek

A propos de l'auteur

Mon nom est Philippe. J'habite sur la rive sud de Montréal. Je suis un technicien en informatique qui aime discuter de toute sorte de sujets. Bienvenue sur mon blogue!

12 Réponses à “Fannie et Freddie: le cauchemar sur Wall Street.”

  1. Wow! Et moi qui cherchait justement à en apprendre un peu plus sur les subprimes, voilà un résumé qui me laisse sans voix et qui répond à mes questions! Merci pour cet article très pertinent!

  2. @LBII:

    Merci. C'était un sujet qui n'était pas facile à vulgariser et condenser. On pourrait facilement écrire un livre sur la stupidité de cette crise.

  3. Bonjour,

    Effectivement, billet fort intéressant qui nuance les causes de la crise et qui permet de ne pas tout mettre sur le dos du libéralisme économique. Vous avez aussi raison de dire que le gouvernement américain ne fait que repousser le problème en avant. Voyez maintenant que tous les yeux se tournent vers Lehman Brothers.

    Un dossier à suivre.

     

  4. @Gestionnaire Borg:

    Merci et bienvenue sur mon blogue.

    Effectivement, vous avez raison. Peu importe qui remportera la présidentielle, une de ses première tâches sera de restaurer la confiance et règler le cas de Fannie et Freddie une fois pour toute. Pour Lehman, c'est peut-être trop tard.

  5. Les Américains vont bientôt être totalement ruinés. C'est dommage, mais c'est la triste réalité. Depuis leur début, l'État via la Fed a installé une mécanique qui n'a qu'approfondi le gouffre. Ça fait déjà quelques temps que j'aiguille mes partenaires d'affaires vers les marchés asiatiques. Asie = Libre-marché + Cheap labor + coûts d'investissements bas. L'Amérique n'est pas de taille à ça.

    En passant, salut mon cher Borg !

    ————————

    «Reconnais le moment favorable.»

    Pittacos de Mytilène

  6. @Fraddé:
    Bienvenue sur mon blogue,

    Je ne crois pas que les américains soient ruinés, mais cette crise va quand même leur faire mal. Par contre, à part pour le secteur bancaire et financier, le reste de leur économie est solide.

  7. "Je ne crois pas que les américains soient ruinés"

    J'ai parlé au futur (vont). J'ai parlé de l'Asie : en passant, ce ne sont pas eux qui financent la dette américaine ? Oh que oui ! La grande erreur est de mettre énergie, confiance et argent dans le système nord-américain. La consommation des Asiatiques est l'avenir, car dites-vous qu'un jour ils auront tous leur voiture, leur équipement électronique, etc. À vrai dire, c'est déjà commencé et ça prouve que le marché se développe là-bas alors qu'ici il vit sur du temps emprunté.

    "le reste de leur économie est solide"

    C'est temporaire. Car dites-vous que ce fameux 'reste' est directement lié à la santé du système bancaire américain. Là aussi, ce n'est qu'une question de temps.

    ————————

    «Reconnais le moment favorable.»

    Pittacos de Mytilène

  8. @Fraddé:

    Aucun doute que les économies émergentes d'Asie vont prendre de l'expansion dans un futur rapproché, mais l'économie américaine a survécu à bien pire que la crise actuelle. Je ne serais pas prêt à les déclarer KO à court ou long terme.

  9. Il n’y a que les politiciens étatistes qui peuvent croire qu’il est possible d’avoir un marché égalitariste et «forcer» les banques à accorder des prêts selon des critères autres que la solvabilité de l’emprunteur. Sans le CRA et les GSE, l’accession à la propriété des minorités aurait certainement été plus lente, mais elle aurait été plus saine.

    Bon dieu, quand je pense qu’il y a  des gens qui vont croire les sottises que tu ramasses sur le web sans réfléchir.
    Juste pour te signaler qu’il y a au Canada la SCHL, une bibitte gouvernementale, qui arrive à faire de l’argent avec l’assurance hypothécaire. Alors ton discours, sur un sujet que manifestement tu ne comprends pas, est trompeur.

    Désolé de le dire de cette façon.

  10. @Folonien:

    Bienvenue sur mon blogue.

    Tout d'abord, l'article que je présente est basé sur un rapport d'un institut économique reconnu, pas de n'importe où sur l'internet. Ses conclusions sont en accord avec des dizaines d'autres rapports de sources vénérables comme le Cato Institute, le Ayn Rand institute, le Washington Post et le Ludwig von Mises institute. Tu excusera donc mon scepticisme quant à ta capacité à évaluer ma connaissance du sujet.

    Pour ton info, la situation de la SCHL au Canada n'est en rien comparable à Fannie Mae et Freddie Mac aux É-U, qui étaient contraintes par le HUD d'avoir plus de 50% de leur portefeuilles en hypothèques subprime. Que je sache, il n'y a aucune loi au Canada qui contraigne les banques à accepter leurs emprunteurs sur autres critères que ceux de la solvabilité. C'est pourquoi notre système bancaire est peu touché par cette crise.

    Essaie d'apporter des arguments au lieu de sophismes ad hominem… Désolé de le dire de cette façon.

  11. « Que je sache, il n’y a aucune loi au Canada qui contraigne les banques à accepter leurs emprunteurs sur autres critères que ceux de la solvabilité. »

    Tu me montres cette loi américaine? Tu m’expliques en tes mots en quoi cette loi a eu des effets dévastateur sur le monde financier de la planète?

    Merci de tes lumières

    Merci

  12. @Folonien:

    Quelques lectures que je te suggère:

    http://www.virtualreality.blogdns.com/?p=367 http://online.wsj.com/article/SB12229898255870034http://www.cato.org/pub_display.php?pub_id=2467 http://www.fahayek.org/index.php?option=com_conte

    Le Community Reinvestment Act a été voté en 1977 sous l'administration Carter (un démocrate) et renforcé en 1995 sous l'administration Clinton (Tiens! un autre démocrate…). L'objet de cette loi est de diminuer la supposée discrimination des banques envers certains groupes ethniques comme les noirs et les hispaniques, sans tenir compte que ceux-ci sont économiquement défavorisés, donc moins solvables. Elle impose des pénalités aux banques qui refusent d'appover des hypothèques à ces groupes. Cette loi n'est pas la seule responsable du débâcle, mais elle y a contribué grandement. Une hypothèque subprime sur cinq a été conclue sous l'égide du CRA.

    Il n'y a aucune loi équivalente au Canada qui contraint les banques à accorder un hypothèque à quelqu'un qui n'est pas solvable.